Résumé des débats de 2018/19 aux Chambres fédérales sur la révision partielle de la loi sur de droit d’auteur

La révision partielle de la loi sur le droit d’auteur (LDA), dont l’examen a été entamé le 22 novembre 2017, se fondait sur un compromis adopté par le groupe de travail AGUR 12/II au terme de plus de cinq ans de négociations. Ce groupe, institué par la conseillère fédérale Simonetta Sommaruga après que les travaux du premier groupe AGUR12 se furent soldés par un échec, était formé de représentantes et de représentants de tous les groupes d’intérêts concernés par la LDA. L’objectif déclaré de Mme Sommaruga était de soumettre au Parlement un projet adaptant la LDA aux derniers développements de la technologie et susceptible de rallier une majorité grâce à un compromis trouvé entre ces groupes d’intérêts. Du côté des acteurs culturels, ce sont surtout les représentant·e·s de la littérature, des arts visuels et du journalisme qui ont dû faire des concessions douloureuses et abandonner des revendications cruciales.  

Ainsi, les nouvelles formes de rémunération que demandaient les acteurs culturels n’ont pas été prises en considération. Les pertes de revenus subies par les artistes dans les médias électroniques allaient continuer de ne pas être compensées. Les consommatrices et consommateurs pourraient continuer de se servir gratuitement sur Internet, par exemple sur des plateformes où l’utilisation massive d’œuvres littéraires et artistiques sans la moindre réglementation des droits d’auteur permet aux exploitants d’engranger des milliards sans que les acteurs culturels touchent un seul centime. Une indemnisation modérée des autrices et des auteurs pour le prêt de leurs livres n’a pas davantage pu s’imposer que le droit de suite exigé depuis des lustres pour les arts visuels, ou qu’une rémunération incessible des œuvres et prestations journalistiques.

Le projet du Conseil fédéral s’est donc limité aux éléments issus du compromis d’AGUR12/II:

  • Quelques mesures ont été proposées pour imposer le droit en vigueur contre le piratage sur Internet. Il s’agissait de faciliter la poursuite pénale des prestataires illégaux proposant des offres en masse. En contrepartie, des atteintes moins graves aux droits d’auteur ne seraient pas poursuivies, ou seraient même admises. 
  • Les archives et les organes de diffusion obtiendraient de nouvelles possibilités de présenter ou de rendre accessibles des œuvres sur Internet. Les œuvres d’autrices ou d’auteurs inconnus pourraient être publiées en ligne, et la présentation au public de collections dans des inventaires sur Internet par des images et des extraits de textes serait autorisée. 
  • Les autrices, auteurs et interprètes seraient rémunérés pour l’utilisation en ligne d’œuvres audiovisuelles (vidéo à la demande) par l’intermédiaire de leurs sociétés de gestion. 
  • Une protection de la photographie serait introduite.
  • Enfin, il était proposé d’adopter deux traités internationaux que nul ne contestait.

Comme il importait de défendre ces quelques améliorations concédées aux auteurs et interprètes, Suisseculture a soutenu ce projet présenté dans l’esprit du compromis. Cependant, comme on pouvait s’y attendre, il est très vite apparu que tous les membres d’AGUR12/II ne s’en tiendraient pas au compromis trouvé. Déjà au sein de la commission préparatoire du premier conseil – la Commission des affaires juridiques du Conseil national –, des propositions ont été présentées qui auraient réduit le compromis à néant. Les bibliothèques voulaient pouvoir prêter les œuvres sans indemniser les auteurs, l’hôtellerie visait la transmission gratuite d’émissions de radio et de télévision dans les chambres d’hôtel, et les universités réclamaient une restriction en faveur de la science. D’autres interventions demandaient une restriction pour la télévision en replay et des attaques se préparaient contre la protection de la photographie et l’indemnisation pour la vidéo à la demande. Logiquement, d’autres voix sont intervenues au sein des commissions en vue d’améliorer la situation des autrices et des auteurs, en faveur d’une rémunération incessible des œuvres et prestations journalistiques et, plus avant dans les débats, pour un droit de prêt pour les œuvres littéraires. 

Lien vers les dépliants des propositions des commissions lors des débats du Conseil national et du Conseil des États.

Lien vers les autres propositions présentées au Conseil national et au Conseildes États

Lors de nombreuses interventions écrites et personnelles auprès de parlementaires ainsi que de la nouvelle conseillère fédérale chargée du dossier, Karin Keller-Suter, et d’entretiens en commission et dans les groupes parlementaires, Suisseculture a défendu, avec ses organisations membres, les revendications des autrices, auteurs et interprètes, rappelant sans relâche le compromis qui avait été trouvé entre tous les groupes d’intérêts. 
 
Cette tactique s’est finalement avérée payante. Toutes les propositions contraires au compromis ont été rejetées. Le projet a ainsi été adopté tel que le Conseil fédéral l’avait présenté. 

Lien vers l’ensemble des débats aux Chambres fédérales

 

Lien vers les révisions de la loi sur le droi d'auteur 1992 et 2007